Définition

Définition : pierre sèche

Définition
Une construction à pierre sèche est une construction bâtie sans liant de quelque nature que ce soit.

Mode-Phénomène: Si le mode de construction à pierre sèche est très vieux, la construction des cabanes agricoles à pierre sèche est un phénomène s’inscrivant dans un champ historique connu (post-médiéval avec l’extension des terres cultivées autour des villages et de l’individualisme agraire durant le dix-neuvième siècle).

Pour construire à pierre sèche, il faut de la pierre provenant des strates superficielles du socle rocheux et, pour obtenir cette pierre, il faut avoir des piochons en fer et des barres à mine (à l’exemple des vignerons du XIXème siècle, grands épierreurs et constructeurs de guérites et de cabanes en pierre sèche). Les outils en fer ne se sont répandus que très tardivement. Au Moyen-age, les instruments aratoires, les outils agricoles étaient en bois durcis au feu, avec des renforts de métal.

Les constructions en pierre sèche sont issues de la mise en culture de terrains où la roche est affleurante et délitée (fracturée en strates).

L’épierrage de ces terres était une pratique nécessaire consistant à débarrasser les parcelles des pierres, cailloux ou blocs gênant la culture.

Cette opération, effectuée chaque année après le labour, impliquait l’accumulation des pierres sous la forme de divers témoins : tas, murs, guérites et cabanes.

Le tas d’épierrement consiste à regrouper au même endroit le matériau d’épierrage d’une ou plusieurs parcelles.

Par économie de surface, les tas d’épierrement étaient souvent bâtis en parements ou pareils à des murs successifs accolés.

Les murs délimitaient chaque lopin de terre ainsi que le réseau des chemins (chemins creux marquant alors l’ancien parcellaire).

La guérite est l’abri le plus simple ; elle est souvent incluse dans les murs ou dans les tas.

« La cabane est une construction indépendante permettant l’abri temporaire des vignerons : journaliers ou propriétaires. Les cabanes à pierre sèche – abris individuels temporaires – ne peuvent-être comparées qu’à d’autres abris temporaires dans l’espace et dans le temps.

La proximité de sites préhistoriques d’une zone à cabanes de pierres bâties à sec n’est pas un critère d’ancienneté (et à fortiori d’antiquité). »

Plus jamais ça

PLUS JAMAIS ÇA :
Janine Durrens – Coutumes et traditions en Péigord – Edition Sud-Ouest 1988″
« Les Bories
Ces Huttes, Garriottes, Mazels, Cahuttes qui portent encore d’autres noms suivant les lieux où elles ont été édifiées…Leur édification remonterait à 2 à 3000 ans avant J-C. Elles sont, sans doute, après les grottes et abris sous roches, les premières habitations humaines…Elles ont servi de bergeries, d’étables, de refuges aux chasseurs, de greniers, de temples, d’habitation et même de sépultures quand elles voisinent avec des mégalithes. »


« Pour affirmer que les cabanes en pierres sèches d’aujourd’hui ont eu des ancêtres il y a 4000 ans. Il faudrait prouver une filiation ininterrompue sur 4 millénaires (pas moins) avec des jalons dûment identifiés et attestés (grâce à des fouilles probantes et à des recherches d’archives). »

« Une maçonnerie à pierre sèche – donc sans liant – n’a pas une cohésion et une solidité qui lui permette de traverser 2000 ans d’histoire. Ce n’est pas une maçonnerie au mortier romain. L’expérience des chercheurs montrent que ces édifices sont en fait très fragiles et que partout en France, ils sont en train de tomber en ruine faute d’entretien et par l’action des intempéries et de la végétation. » C.E.R.A.V. Tome XV 1991.

Mise au point

Mise au point

Les fameuses « cabanes gauloises », les « huttes » ont attiré de nombreux touristes faisant confiance à la parole écrite et publiée, donc « vraie »… Les « bories » dont « l’édification remonterait à 2000 voir 3000 ans avant J-C » ont bien failli effacer le souvenir, la mémoire de nos anciens qui ont travaillé durement leurs lopins de terre, épierré les parcelles et érigés les murs, cabanes et guérites. Ces constructions, ces abris temporaires, ne remontent surtout pas à ces « temps immémoriaux », comme l’on dit et le disent encore des personnes dont les élucubrations ne manquent pas d’alimenter des discours qui relèvent de l’affabulation.

Ces constructions se situent dans un champ historique qui est le leur « post-Révolution » et un milieu social agricole auquel elles appartiennent. Ces appellations « bories celtiques, gauloises, romanes, moyenâgeuses » sont purement fantaisistes et parfois sciemment mensongères souvent au service d’intérêts touristiques, mercantiles. Tout ceci au détriment de la mémoire de nos aïeux qui n’étaient pas de lointains gaulois mais nos paysans d’hier.

Jean-Marc Caron

Pas étonnant que Madame J. Durrens cite Monsieur R. Dechère dans la rubrique « pour en savoir plus ». Si l’ extrait qui suit est déjà édifiant le texte de Monsieur R. Dechère est l’apogée attristant de ce qui aurait pu être publié dans une grande collection « Les énigmes de l’univers » au même titre que « Les civilisations mystérieuses ».
Janine Durrens – Coutumes et traditions en Péigord – Edition Sud-Ouest 1988″
« Les Bories
Ces Huttes, Garriottes, Mazels, Cahuttes qui portent encore d’autres noms suivant les lieux où elles ont été édifiées…Leur édification remonterait à 2 à 3000 ans avant J-C. Elles sont, sans doute, après les grottes et abris sous roches, les premières habitations humaines…Elles ont servi de bergeries, d’étables, de refuges aux chasseurs, de greniers, de temples, d’habitation et même de sépultures quand elles voisinent avec des mégalithes. »


René Dechère, Les huttes du Périgord, de la Préhistoire à nos jours, chez l’auteur, Daglan, 1981, 88 p. (compte rendu de Pierre Haasé). Parution initiale dans L’architecture vernaculaire, tome 7, 1983 © Pierre Haasé – CERAV »

«Monsieur Dechère, dont la carte de visite s’orne d’une impressionnante liste de titres, membre de la S.H.A.P, de la S.F.E.S., de l’E.S.P.E.R, de l’I.F.R.A., et j’en passe, a décidé en 1981 de publier le résultat de quinze années de recherches sur le Causse de Daglan et en Sarladais, où il traqua la hutte gauloise comme d’autres se payent un safari au Kenya. S’il connaît les travaux du C.E.R.A.V., qu’il cite, il en déplore le caractère scientifique, ce qui lui apparaît comme un vice rédhibitoire. Car M. Dechère, s’il n’avoue pas un mépris ostentatoire pour le souci scientifique – il n’oserait point après avoir étalé ses titres –, a par contre une conception de la vulgarisation très particulière : pour la tourbe, foin de précision et haro sur la rigueur au profit du lyrisme le plus débridé, quitte à utiliser une orthographe et une syntaxe pour le moins libérées; passons sur les pléonasmes (les « car en effet » ne se comptent point) pour ne retenir que ces quelques extraits : « Aucune hutte ne se ressemble » (p.17) ou « Car on peut constater que pour construire de telles merveilles d’architecture, il ne s’agit pourtant que de gens de la terre qui fabriquait de ses propres mains et décidait lui-même de sa maison » (p.12). Comprenne qui pourra… Il est vrai que l’auteur avoue une prédilection pour « la pure archéologie romantique ». Ajoutons que la modestie n’étouffe pas notre auteur féru des mystères à en juger par sa page d’introduction en forme d’auto-encensement.
On pardonnerait volontiers ces traits – chacun a ses travers – si la qualité de la recherche les faisait oublier, mais le titre annonce clairement de quoi il relève : les cabanes de pierres sèches, nombreuses en Périgord, et dans le secteur de Daglan plus particulièrement, sont des huttes (sic) gauloises. L’argument massue de M. Dechère ? « Les cartes postales, prospectus divers de n’importe quelle région de France », les présentent comme telles ! Parole de publicitaire, parole d’Evangile. Défilent sous nos yeux des « igloos », « tumulus », « forteresse », « cloche » et bien sûr « temple ». De quelle époque ? Allez savoir, car ici tout devient « visiblement très ancien ». Si vous insistez, on vous répondra que c’est archaïque donc ancien. Curieuse assimilation du paraître à l’être. Des critères de datation ? Eh bien, entre autres la possibilité de s’étendre au sol. Ainsi, telles cabanes de Daglan « permettent à deux ou trois personnes de s’allonger ». On n’ose imaginer ce qui pouvait se passer dans ces cabanes… M. Dechère demeure ébahi devant « cette somme de travail considérable », « un ouvrage aussi colossal », « un travail aussi prodigieux ». Sait-il que quelques heures suffisaient à un ou deux constructeurs bien entraînés pour dresser une cabane ? Son enquête se mue en un hymne au travail et en une litanie passéiste devant ces « œuvres spontanées » dues à une « intelligence innée ». Et pourtant « il ne s’agit que de gens de la terre ». Splendide commisération.
Les sources de M. Dechère sont essentiellement P. Desaulle, qu’il démarque purement et simplement, quand il n’en appelle pas au « Livre du passé mystérieux » de R. Charroux, si ce n’est aux « Géants venus du ciel ». Il ne manquait ici que les extraterrestres. M. Dechère prend ses fantasmes pour des réalités. Pauvre Périgord qui n’est plus que la banlieue des galaxies conquérantes !
Il y aurait beaucoup à dire sur les amalgames géographiques – que font ici les « bories » de Vaucluse ? Les restanques ? Les témoignages des Alpes-Maritimes ? Les Nuraghi sardes ? – et historiques – quel besoin d’en référer à Gaston Dominici ?
On hésite entre un homérique éclat de rire et l’inquiétude devant la divulgation en fin du XXe siècle de pareilles élucubrations. Que reste-t-il alors du livre de M. Dechère ? A coup sûr une belle collection de clichés photographiques, qui ont au moins le mérite de fixer quelques cabanes menacées par le temps. Puis des notations éparses : quelques témoignages oraux dont l’auteur ne se rend même pas compte qu’ils contredisent ses thèses, en insistant sur la fragilité, le caractère récent voire contemporain des édifices, leurs éléments fonctionnels et pratiques, leur environnement socio-culturel.
Nous conclurons en renvoyant le lecteur qui voudra se documenter sur cette région aux études publiées dans L’A.R.P.S. puis L’Architecture Vernaculaire par MM. Pitiot et Poupon, Véber et tout récemment Poujardieu. Renvoyons M. Dechère à ses chères études. Il a mis quinze ans à commettre cette plaquette. Espérons qu’il mettra encore quinze ans avant d’en publier une autre. »

© Pierre Haasé – CERAV